Psychopathologie de la dépression


1         Définition 

La dépression est une maladie mentale caractérisée par une modification profonde de l’humeur, dans le sens de la tristesse.

 

2         Abord psychopathologique des symptômes

2.1    L’humeur dépressive

Elle est caractérisée par un sentiment de tristesse permanent. Chez le déprimé, toutes les bases de son existence sont remises en question. Il perçoit les changements dans son rapport avec les autres, avec inquiétude et angoisse. Il exprime ce changement en terme de fatigue, d’impuissance et d’ennui. Il y a également une atrophie de la capacité de désirer (désirer dans le sens d’un moteur : mouvement vers l’avant).

Le déprimé a également perdu la capacité à éprouver du plaisir (ANHEDONIE), rien n’a de goût pour lui, rien ne lui apporte de la joie, un évènement heureux peut même l’aggraver.

Pour lui, le temps n’a plus de cours, c'est-à-dire que le passé, le présent et le futur sont la même chose douloureuse : VIVRE.

Cette tristesse intense et injustifiée ainsi que la souffrance qui en découle ont une valeur expiatoire.

 

2.2    Les idées noires

Ce sont toutes les idées négatives et pessimistes du sujet envers lui-même et envers l’avenir.

Dans la dépression, il y a une forte baisse de l’estime de soi, le déprimé accumule les pensées dévalorisantes concernant sa santé et ses qualités. Ses idées d’autodépréciation le conduise à émettre continuellement des jugements péjoratifs sur lui-même. Il y a aussi des idées d’autoaccusation qui consistent à s’accuser des fautes imaginaires ou très exagérées par rapport à la réalité. Ces idées d’autoaccusation sont liées au sentiment de culpabilité d’avoir détruit son objet d’amour. Les idées noires traduisent un acharnement contre soi.

 

2.3    Les idées suicidaires

Ce sont toutes les idées faisant référence à la mort et qui implique les gestes et les intentions. La douleur morale et la souffrance sont au centre de ses idées suicidaires.

La douleur morale est un sentiment prolongé de peine intense, elle est en rapport avec les idées de culpabilité et déterminante dans le désir de mort.

Dans les idées suicidaires, le sujet met en avant la notion de fin, la fin de la souffrance de vivre mais pas celle de la souffrance psychique.

Surtout ne pas entendre, (quelque soit la pathologie) les idées suicidaires comme une tentative de chantage.

La mort apparaît comme une solution possible mais pas du tout comme un espoir. Tout cela incite au repli, à l’isolement et à l’impossibilité d’établir des contacts avec autrui.

 

2.4    Le ralentissement psychomoteur

Ø      Sur le plan moteur : le ralentissement se manifeste par une lenteur dans l’exécution des gestes et par la rareté des changements de posture. 

Ø      Sur le plan psychique : le discours est rare, les propos sont brefs et laconiques (oui, non) et entrecoupés de longs silences. 

Ø      Sur le plan idéatif : les associations sont lentes et pauvres, la pensée semble difficile à organiser et à exprimer. Les thèmes sont répétitifs, c'est-à-dire que le patient rumine toujours les mêmes idées. 

Attention, ce ralentissement ne protège pas du désir de mort, il apparaît comme un comportement de retrait pour les autres, il s’agit en fait d’une réponse défensive face à un danger (pas forcément réel), danger qui est surmontable pour le patient, à condition de faire le « mort ».

C’est un arrêt total de l’AGIR qui est lié à la disparition du plaisir et du désir.

 

2.5    L’anxiété

Elle est intermittente. Toutes les idées sont orientées vers le pessimisme et entraîne le sujet à avoir l’impression continuelle qu’une catastrophe va arriver. L’avenir ne peut apporter que des malheurs, l’incapacité du sujet à se projeter dans l’avenir l’emprisonne dans un passé douloureux et dévalorisant, ce qui lui interdit tout désir et tout plaisir.

 

3         L’anticipation dépressive

3.1    Définition

C’est le mouvement par lequel le sujet se projette au delà du présent et se tourne vers l’avenir. C’est un phénomène strictement personnel.

Dans l’anticipation, on retrouve une prévision de l’avenir avec l’évocation du passé, l’intégration de la situation présente (positive ou négative) est l’aspiration à un idéal. 

3.2    Les aspects de l’anticipation dépressive

Dans la dépression, il y a une perturbation de la façon d’appréhender le temps, la faculté d’anticipé est perturbé, c'est-à-dire que le déprimé stagne dans un passé douloureux et indépassable. Le présent est soumit au poids du passé, il est incapable de se projeter dans l’avenir et par conséquent vers un idéal.

On a la perte de la communication (presque plus de relation sociale avec le monde), on a la solitude qui est le résultat de son inhibition et de son repli sur soi, le jugement négatif qu’il porte sur lui-même ne lui permet pas d’avoir une image positive de lui et encore moins d’imaginer que les autres puissent avoir une autre image de lui.

On a l’impuissance qui se traduit par une baisse de ses activités, par la difficulté de supporter une critique et de toute façon, ils se sentent incapables de faire quoi que se soit.

Le sentiment d’impuissance est surtout intellectuel, mais il est ressenti au niveau du corps.
 

4         Abord psychopathologique des différentes formes

4.1    La dépression réactionnelle

C’est un état dépressif plus ou moins intense, consécutif à un évènement traumatique, cet état ne dure pas. C’est ce qu’on peut présenter suite à un deuil, à un licenciement et dans les dépressions d’épuisement.

Les idées dépressives amènent le sujet à considérer les difficultés actuelles comme insurmontables, il sous estime ses capacités, il s’agit plus d’un état de détresse qui se manifeste par une tension corporelle, une instabilité thymique et une incapacité à résoudre ses conflits.

Si un facteur psychologique, traumatique donne cette allure réactionnelle, c’est en fait la fin des difficultés qui provoquent la décompensation dépressive.

 

4.2    La dépression névrotique

C’est un élément majeur de la décompensation sur une structure névrotique.

C’est la souffrance liée à la dévalorisation de son image, les pensées sont orientées vers la rumination axée sur l’image.

La nature névrotique de la dépression se révèle par la possibilité du sujet à utiliser cette douleur dépressive pour élaborer psychiquement et s’en sortir.

 

4.3    La dépression mélancolique

Freud avance que la mélancolie peut se comprendre en la comparant au phénomène de deuil.

Le deuil est définit à la fois comme un état normal du à la perte d’un objet (objet psychique) aimé et comme un travail psychique ayant pour but d’aider le patient à renoncer à cet objet perdu.Le mélancolique, comme la personne endeuillée souffre de la perte d’un objet, cette perte réelle ou imaginaire fait que le sujet se repli sur lui-même, s’accable de reproche et affirme mériter la mort.

La mélancolie est donc une réaction à la perte d’un objet, le rapprochement avec le deuil se fait en différentes étapes :

Ø      Déni de la réalité : c’est une réaction défensive consécutive au choc et qui permet de surmonter la douleur,

Ø      L’envie d’être consolé : il y a de plus en plus de réaction affective,

Ø      Identification et idéalisation à l’objet perdu : s’identifier à la personne morte comme moyen de s’approprier l’objet. L’idéalisation permet que l’image idéale de l’objet reste et que donc, cet objet devient moins important,

Ø      Idée et culpabilité : le sujet commence à se confronter à la réalité de la perte et à ressentir un vide interne. Le sujet s’accuse au lieu d’accuser ce bon objet (idéal),

Ø      Détachement progressif à cet objet : c’est la prise de conscience que ce qui disparaît, ce n’est pas l’objet mais la quantité d’investissement lié à cet objet.

 

Dans la mélancolie, le travail de deuil est impossible jusqu’au bout, car la perte de l’objet est en fait une perte narcissique. Le sujet inconsciemment a l’impression de s’être perdu et il est incapable de renoncer à cet objet perdu et donc de réinvestir d’autres objets.

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